Les années 2000
On sort de chez soi, le matin, et l' on trouve le temps gris ou bleuté, ou venu de toutes sortes de mélanges entre les deux, et l' on se dit que c' est le bon jour. Quelque chose dans l' air rend l' esprit, infatigable, alerte, et disponible aux beautés du monde comme à la compréhension des vérités les plus intimes qui l' ont forgé. Les oeuvres récentes de Claude Abad procurent toutes, et immédiatement un tel sentiment. Elles incitent à la marche, une marche en dedans et au dehors, en soi et au coeur de la vie qui va. Le promeneur ainsi invité ne doit pas presser le pas, il doit marcher à son rythme, rythme qui est celui du peintre. Non pas qu' il l' impose, car la cadence de Claude est persuasive et non doctrinale, mais par ce qu' est la mesure juste, la seule bonne amplitude qui puisse permettre de garder le sens de nos propes repères, ceux qui balisent nos mémoires et nos désirs, nos deuils et nos amours, comme ceux qui renseignent nos avenirs fragiles et nos espoir incertains. Alors ici encore Claude Abad tend la main, il accompagne, il guide. Le jeu de ses ombres, brisées, brunies, quelquefois à demi mangées de lumières élargit nos regards ; les épures de ses traits, de ses courbes, de ses ellipses, conduisent ceux-ci, et les encouragent aux parcours, repris et recommencés. Non à l' errance mais à la reconnaissanse, car tous ces signes semés en réalité, dans la rareté nous mènent et nous préparent à vivre la rencontre de couleurs éparses, qui paraissent s' arracher d' elles-mêmes à la tension sourde et trop lourde d' une peinture originelle, fatalement défaillante. Pourtant personne n' est aussi peintre que Claude Abad, mais il est probablement le seul, ou l' un des rares, à ne peindre que ce qui, aujourd' hui, peut l' être sans ajouter à la quantification génale et obscène des images. Il est le peintre de la dignité, l' homme d' une peinture qui ne résout pas à douter d' elle même, et qui ose représenter le bon jour, le moment difficile où enfin il se montre. C' est en cela que son travail est nécessaire et vital.
Daniel BÉGARD - 26/07/05 |